MADAR/Nouakchott/Le 05-01-2024
Sans un système éducatif performant la Mauritanie n’ira nulle part. Jusque là nos gouvernants ont eu du mal à comprendre ce postulat pourtant si simple et si clair.
Les régimes se succèdent et se ressemblent et la volonté politique souvent si rabâchée s’avère toujours n’être un vœu pieux. Espérons que le pouvoir actuel soit l’exception qui confirme cette triste règle. Malgré un programme impeccable et une vision révolutionnaire à première vue avec pour objectif noble la réinstauration de l’école républicaine d’antan, on ne voit toujours pas des résultats probants venir 4 ans après l’installation effective du président Ghazouani au palais présidentiel.
Curieux quand on connait l’urgence de cette question. La Mauritanie a pourtant eu par le passé l’un des meilleurs systèmes éducatifs d’Afrique et les élèves mauritaniens étaient très bien formés malgré le manque de moyens à l’époque.
Cela fut possible grâce à la gestion sans complaisance du système éducatif et à la coopération exemplaire avec les partenaires extérieurs. Les élèves mauritaniens ont pu ainsi bénéficier de bons enseignants mais aussi de bons manuels scolaires entre autres le fameux syllabaire, le mythique livre de calcul « Auriol »,le nom moins attrayant manuel illustré de « Sciences d’observation » des manuels d’apprentissage miracles mais aussi de toute la collection du célèbre Institut Pédagogique Africain et Malgache (IPAM) avec notamment les IPAM (CM1 et CM2) qui renferment les plus beaux textes de la littérature africaine et française. Sans oublier des manuels comme « Amis lisons ensemble » et « Matin d’Afrique »…
Les techniques d’enseignement étaient méthodiques et efficaces et encourageaient la mémorisation des leçons, y compris les textes, et les élèves progressaient ainsi très vite. L’Orthographe occupait une place de choix avec l’organisation régulière de la dictée. Ainsi grâce à ce système bien huilé, l’élève était déjà capable dès le primaire de naviguer aisément à travers la langue et d’être autonome.
Les élèves du primaire se familiarisaient avec les textes d’André Gide, d’Emile Zola, les Fables de la Fontaine…Alors qu’aujourd’hui on forme des professeurs de langue dont la plupart n’ont jamais lu un roman.
Les anciens écoliers mauritaniens ont été formés pour beaucoup d’entre eux sous la tente ou dans des salles en terre battue. Ils ont acquis leurs connaissances dans des livres obtenus au forceps et au cours des révisions à la lueur de la lampe-tempête ou au clair de lune. Mais leurs successeurs d’aujourd’hui ne leur viennent même pas à la cheville malgré le confort, l’internet et les trillions de données et de connaissances dont ils disposent à travers les médiathèques numériques.
Malheureusement ce système si efficace et qui soi-dit en passant favorisait l’intégration a été balayé en 1978 avec le début de la série noire des putschs et autres révolutions de palais, qui ont eu pour conséquence entre autres, la politisation de l’école mauritanienne avec l’arabisation et tous ses déboires. La descente aux enfers fut fulgurante et aujourd’hui, on voit le résultat, avec des détenteurs de doctorats qui ne font pas le poids devant un ancien élève du CM2.
La solution comme on le voit n’est pas loin et il suffit tout juste de s’inspirer de l’école d’antan en y associant les outils de la révolution numérique.
Les commissions chargées de réformer notre système éducatif devraient associer les professionnels du secteur et éviter au pays ces réformes entre quatre murs qui n’ont fait qu’enfoncer davantage le système.
Aujourd’hui l’école mauritanienne doit repartir sur des bases solides. En effet l’économie du savoir doit constituer l’un des axes stratégiques de la politique éducative.
Les pays développés ont misé sur l’éducation pour atteindre ce stade et ont investi sur la formation des ressources humaines. Un pays comme le Japon est très pauvre en ressources naturelles mais il a mis sur pied un système éducatif révolutionnaire basé sur l’excellence. Au Japon il y a des écoles pour les surdoués. D’autres pays beaucoup moins importants tels que la Chine et l’Inde ont cravaché dur et, à force d’efforts et de discipline sont arrivés à se hisser au sommet. C’est le cas aussi des fameux dragons asiatiques (Taïwan, Singapour, Corée du Sud…) qui de pays très pauvres ont gravi les échelons et sont arrivés dans l’anti chambre des grands.
En 1960, la Corée du Sud était plus pauvre que le Sénégal. Regardez la différence entre les deux pays aujourd’hui.
En Afrique, un pays comme le Rwanda fait des miracles sur ce plan. Aujourd’hui, grâce au bio mimétisme la technologie avance à pas de géants et l’éducation constitue la clé pour l’accès au progrès et au bien être de tous.
Voilà le chemin sur lequel devrait s’engager la Mauritanie pour espérer un jour occuper une place de choix dans le concert des nations.
Bakari Guèye