Le360afrique – Le retour dans les établissements scolaires est marqué par une crise structurelle du système éducatif qui sévit depuis des années à laquelle s’est greffée une réforme appréhendée par les opérateurs de l’enseignement privé.
C’est la rentrée scolaire en Mauritanie. Les élèves sont retournés à l’école lundi 2 octobre pour une année scolaire qui sera marquée par de nombreux défis à relever aussi bien par le corps enseignant que par les élèves. Obstacle majeur à surmonter, la réforme du système éducatif globalement lancée dans la précipitation. Cette réorientation vise l’arabisation plus poussée du système éducatif.
Après l’abandon du français en première année de l’école primaire l’année dernière, cette année sera marquée par l’abandon de la langue de Molière en deuxième année du même palier scolaire.
L’autre objectif de cette réforme du système éducatif est de réserver, progressivement, l’enseignement du cycle primaire aux seuls établissements publics au détriment du privé à l’horizon 2028-2029.
A cette échéance, le privé sera définitivement exclu de l’enseignement élémentaire en Mauritanie, mais demeurera au niveau du collège et lycée.
Cette réforme s’accompagne de l’arabisation de l’enseignement, y compris les matières scientifiques -maths, physique, chimie et sciences naturelles- et l’introduction des langues nationales -Peul, Soninké et Wolof- dans le système éducatif.
Il est évident que ces réformes ne fassent pas l’unanimité et sont mal accueillies par les gérants et les enseignants des écoles privées mauritaniennes.
Diallo Dioukhamady, propriétaire d’une école privée, convient de l’obligation de la mise en application d’une loi d’orientation, qui s’impose à tous les acteurs.
Mais il souligne les difficultés liées à la perte de la première année, puis de la deuxième au niveau primaire, dans la filière francophone. A cela s’ajoute l’obligation pour les enseignants de dispenser les cours de mathématiques en arabe à partir de la troisième année.
Cet opérateur de l’enseignement privé voit à travers la réforme une perspective de disparition de la filière francophone dans le primaire, et pose le problème de l’accompagnement par les ressources humaines et les outils pédagogiques.
Un déficit qui va créer une génération d’enfants sacrifiés dans le primaire. Il déplore également le coût social qui oblige les administrations des écoles à une rupture de contrat avec certaines catégories d’enseignants.
Malick Diagne Ba, enseignant de philosophie depuis 1976, dit craindre de voir les les élèves n’ayant pas le niveau souhaité exclus du système scolaire.
Amadou Sarr, directeur des études et parent d’élèves, remet sur la table les problèmes créés par la réforme éliminant progressivement la filière francophone dans le primaire et suggère une possibilité de réaménagement dans la mise en œuvre pour en atténuer les effets négatifs.
Par ailleurs, Il insiste sur la nécessité pour les parents, de suivre les élèves à la maison, en vue de permettre une adaptation au nouveau contexte.
Signe de la crise structurelle du système de l’enseignement, la Mauritanie continue d’afficher l’un des taux de réussite au baccalauréat les plus faibles au monde. En dépit d’une amélioration comparativement aux années précédentes, le taux de réussite au BAC, toutes filières confondues, a à peine atteint les 15%, dépassant de très peu celui de 2021 et 2022 qui s’établissaient à 8 et 12%.
Par Amadou Seck (Nouakchott, correspondance)