MADAR/Nouakchott le 22-07-2025
L’académie diplomatique de Nouakchott a abrité ce matin la cérémonie de signature de l’accord de financement du projet régional pour l’apprentissage et la collaboration dans l’éducation au Sahel « Relance Sahel ».
L’accord a été signé, côté mauritanien, par le ministre de l’Économie et des Finances, SEM. Sid’ Ahmed Ould Bouh, et, côté Banque mondiale, par le vice-président pour l’Afrique de l’Ouest et du Centre, M. Ousmane Diagana. Le Tchad était représenté par la ministre déléguée à l’Économie et à la Planification, Mme Fatima Haram Acyl.
Le projet régional « Relance Sahel » est une initiative conjointe de la Mauritanie et du Tchad visant à promouvoir l’éducation et à soutenir l’inclusion des jeunes les plus marginalisés dans la région du Sahel.
Ce projet cible en priorité les jeunes déscolarisés ou n’ayant jamais intégré le système éducatif, en particulier dans les zones rurales et marginalisées. Il vient compléter les programmes nationaux déjà existants, tels que le Projet d’Appui à l’Éducation de Base en Mauritanie et le Projet d’Amélioration des Résultats de l’Apprentissage au Tchad.
Le financement global s’élève à 137 millions de dollars américains, dont 72,32 millions destinés à la Mauritanie. Cette enveloppe comprend un prêt à taux concessionnel de 44 millions de dollars octroyé par l’Association internationale de développement (IDA), ainsi qu’une subvention allemande d’un montant de 12,9 millions de dollars.
Le projet s’articule autour de trois axes prioritaires : le renforcement de la gouvernance du secteur éducatif par une plus grande transparence et efficacité ; l’élargissement de l’accès à une éducation innovante à travers le modèle de « l’école ouverte » ; la mise en place d’un système de suivi et d’évaluation performant garantissant la qualité des résultats.
Selon le ministre mauritanien de l’Économie et des Finances ce projet s’inscrit pleinement dans la vision du Président de la République, Son Excellence Monsieur Mohamed Ould Cheikh El Ghazouani, pour la refondation de l’école républicaine, qui aspire à une transformation profonde des mentalités et à la construction d’un contrat social fondé sur les valeurs de citoyenneté et de diversité. Il a rappelé que la Mauritanie avait jeté les bases de cette coopération dès 2021, avec l’élaboration du Livre blanc sur l’éducation au Sahel, fruit d’un partenariat soutenu avec la Banque mondiale et les pays de la région.
Pour sa part, la ministre tchadienne a affirmé que ce projet constitue une réponse à la fois politique et morale face à l’urgence éducative, réaffirmant l’engagement de son pays en faveur d’une gouvernance éducative renforcée et d’un accès accru pour les populations marginalisées.
Le vice-président de la Banque mondiale a indiqué que les deux pays comptent ensemble près de 5,1 millions de jeunes en dehors du système scolaire, un chiffre qui pourrait augmenter de 20 % d’ici 2030 s’il n’est pas résorbé. Il a précisé que le projet bénéficiera à quelque 850 000 jeunes issus des communautés nomades ou réfugiées, avec une attention particulière portée aux filles, qui représenteront 50 % des bénéficiaires.
De son côté, l’ambassadeur de la République fédérale d’Allemagne en Mauritanie, SEM. Florian Rendell, a affirmé que son pays, en partenariat avec la Banque mondiale, a décidé de soutenir cette initiative régionale innovante, à laquelle la coopération allemande consacre plus de 56 millions de dollars.
La cérémonie de signature du projet Relance Sahel s’est déroulée en présence des ministres de la Formation professionnelle, de l’Artisanat et des Métiers, de l’Éducation et de la Réforme du Système éducatif, ainsi que du ministre tchadien de l’Éducation nationale et de la Promotion civique. Étaient également présents le représentant de la Banque mondiale en Mauritanie, ainsi que les partenaires techniques et financiers des deux pays.
Institut éducatif du Sahel et Ecole Ouverte
La cérémonie de signature de cette convention tripartite a été suivie par un conclave dirigé par les 2 ministres de l’Education de la Mauritanie et du Tchad. Au cours de cette session 2 présentations ont été faites, la première a porté sur l’Institut éducatif du Sahel en création et la seconde sur l’Ecole ouverte. Les sessions ont été respectivement présentés par les experts de la Banque Mondiale Jemil et Carine et modérées chacune par l’un des ministres.
Institut éducatif du Sahel
L’Institut éducatif du Sahel qui sera basé à Nouakchott est une institution visant à améliorer l’offre éducative au profit des couches vulnérables. Les 5 pays du Sahel font en effet face à de grands défis sur le plan éducatif avec l’accès de 60% des enfants au primaire, 20% seulement au secondaire et moins de 10% au supérieur. Ce sont là les chiffres les plus bas au monde selon le conférencier. Il existe donc une réelle pauvreté éducative. Seuls 12% des enfants qui finissent leur cursus primaire savent lire et comprendre un texte. Il y a aussi un grand écart entre garçons et filles. Les financements sont insuffisants d’où l’urgence d’un impératif d’éducation dans le Sahel.
Ainsi les 2 composantes du projet sont axées sur la possibilité de rattraper le retard grâce aux nouvelles technologies et la nécessité d’améliorer le pilotage des systèmes éducatifs en misant sur des ministres et des cadres compétents et en ayant une feuille de route appropriée.
Ainsi, conformément à son plan stratégique, l’Institut éducatif du Sahel va se focaliser sur la satisfaction des besoins de formation, le benchmarking d’instituts similaires, une stratégie de financement durable et une programmation détaillée.
L’institut aura quatre missions fondamentales : formation du personnel, formation des formateurs, recherches sur les réformes et la facilitation du travail en commun entre pays du Sahel pour définir, promouvoir et atteindre les objectifs d’enseignement éducatif.
Il se chargera aussi de la formation des planificateurs et des gestionnaires ainsi que les autres intervenants du système éducatif. La formation des formateurs est aussi au programme en plus de la recherche appliquée.
S’agissant de l’échéancier il y a eu la validation du Plan Stratégique en 2024 et l’approbation de l’accord de siège le 22 juillet 2025. L’aménagement des locaux est prévu à partir du 2ème semestre 2025, le démarrage effectif de l’institut aussi.
Composante « Ecole ouverte »
L’école ouverte constitue une réponse possible à la non scolarisation et à la déscolarisation.
Il s’agit d’une approche nouvelle, exemple des universités ouvertes, des tutorats en ligne, des CLOM, de l’école à la maison, de l’université virtuelle…
Dans sa présentation, Mme Corine a souligné que cette école ouverte qui est une nouvelle approche complémentaire de l’école traditionnelle bénéficiera à 800.000 jeunes dans le cadre de ce projet.
Au niveau du primaire on aura 400.000 jeunes en programme d’alphabétisation, 130.000 en éducation accélérée, 40.000 pour le secondaire en enseignement rattrapage et 230.000 pour la formation technique et professionnelle. Dans ces chiffres les filles représentent 50% et les jeunes avec des besoins spécifiques représentent 3,5%.
A noter que les écoles ouvertes ont fait leurs preuves en Inde, au Ghana, en Ethiopie, en Egypte, en Namibie, à Bélize…
Le principe de l’école ouverte peut être appliqué de différentes façons.
L’avantage de l’école ouverte se manifeste à travers des coûts de scolarité beaucoup moins élevés. C’est ainsi que pour un écolier inscrit à l’école formelle il faut environ 320 dollars par an alors qu’au niveau de l’école ouverte il ne coûte que 50 à 60 dollars environ.
Ainsi, à travers ce projet, la réussite de la composante école ouverte pourrait ouvrir de bonnes perspectives pour les enfants sahéliens et attirer des ressources additionnelles de la part des partenaires techniques et financiers.
Bakari Gueye