MADAR/Nouakchott le 11-11-2025
La capitale marocaine abrite cette année les travaux de la 40ème réunion du Comité intergouvernemental de hauts fonctionnaires et d’experts pour l’Afrique du Nord, qui ont débuté ce matin.
Prennent part à ce conclave des délégations venues des pays du Bureau sous régional de la Commission économique pour l’Afrique (CEA) en Afrique du Nord qui couvre sept pays: l’Algérie, l’Égypte, la Libye, le Maroc, la Mauritanie, le Soudan et la Tunisie.
Cette année, les travaux du Comité intergouvernemental de hauts fonctionnaires et d’experts pour l’Afrique du Nord se tiennent sous le thème : « Renforcer la mobilisation des ressources intérieures par l’innovation et la technologie en Afrique du Nord.»
Parallèlement, la Réunion d’experts prévue demain sera placée sous le thème « Renforcement de la mobilisation des ressources intérieures grâce à des politiques innovantes et aux technologies numériques ».
Cette réunion rassemble des représentants des ministères des Finances, de l’administration fiscale, des décideurs politiques et des experts en matière de fiscalité, de gestion budgétaire et de numérisation.
La cérémonie d’ouverture qui s’est déroulée ce matin au Palace La Tour Hassan a donné lieu à une série de discours.
D’abord Mr Khaled Abou Ali Président du Bureau sortant issu de la 39ème session a fait le point du travail accompli en un an à la lumière des priorités préalablement fixées à savoir l’appui aux PME, la mobilisation des ressources domestiques, le profit à tirer des transferts monétaires des migrants et le renforcement de la solidarité régionale.
Les efforts ont aussi porté sur la promotion de l’innovation technologique, la transformation digitale et la vulgarisation de l’usage de l’IA, des points qui sont à l’ordre du jour de cette 40ème session.
Mr Khaled a aussi fait état des défis et des leçons apprises soulignant au passage que la question de la raréfaction du financement demeure le principal frein pour le développement.
A son tour, Mme Amina Slimane, au nom du Secrétaire Général de l’UMA a salué les efforts de la CEA pour renforcer la coopération régionale au service de la réalisation des ODD au profit des peuples de la région.
Elle a ajouté que la réunion intervient dans un contexte particulier marqué par les défis du changement climatique et de la mobilisation des ressources. De ce fait, la souveraineté financière constitue un choix stratégique note-t-elle.
Et d’affirmer qu’au niveau de la recherche des financements, il est plus approprié d’adopter une approche holistique en profitant de la révolution technologique qui offre d’énormes opportunités pour le développement de systèmes fiscaux performants, entre autres.
Le financement digital et l’économie verte sont des opportunités à saisir.
Ces outils, assure Amina Slimane aideront à renforcer l’intégration économique et financière régionale dans le cadre de l’Agenda 2063 et la réalisation des ODD.
Dans son intervention, Adam B. Elhiraika directeur du Bureau de la Commission économique pour l’Afrique des Nations Unies (CEA) en l’Afrique du Nord, a rappelé les objectifs de la réunion et le déroulé de son ordre du jour.
Il a affirmé que la réunion de cette année revêt une importance capitale soulignant que la mobilisation des ressources domestiques constitue le pilier pour le développement de chaque pays.
M.Adam a aussi rappelé le grand écart existant entre les différents pays de la région d’où dit-il la nécessité de mettre en avant la solidarité régionale pour que les uns puissent apprendre des autres.
Selon le directeur du bureau de la CEA en Afrique du Nord, le service de la dette constitue un véritable fardeau et certains pays du continent l’enveloppe qui y est consacrée est plus importante que celles réservées à la santé et à l’éducation.
La mobilisation des ressources domestiques constituent un pilier du développement durable selon le directeur qui affirme que des réformes appropriées sont urgentes pour atteindre cet objectif.
Et d’ajouter qu’il faudrait aussi relever le grand défi des changements climatiques qui constituent une véritable menace sur les économies, en ce sens qu’avec chaque augmentation de 1 degré de température ce sont 20% du PIB qui sont perdus.
Donc le financement climatique et l’appui des initiatives environnementales s’avèrent être plus que nécessaires.
Le directeur du bureau de la CEA en Afrique du Nord a salué les progrès réalisés par certains pays de la région en matière de développement des énergies renouvelables (50 % de la production). Il s’agit là dit-il d’un exemple à suivre en Afrique.
Le représentant du gouvernement marocain a prononcé un discours au nom de Madame Nadia FETTAH, Ministre de l’Economie et des Finances.
Il a salué d’emblée les efforts constants déployés par les membres du bureau de la CEA à Rabat.
Face à la conjoncture internationale difficile avec une baisse de l’aide au développement, à la multiplicité des chocs externes et à un système financier international inadapté, la marge de manœuvre de nos pays devient de plus en plus étroite a dit le responsable marocain.
De ce fait, ajoute-til le renforcement de la mobilisation des ressources nécessite une approche basée sur la promotion de l’inclusion financière, le développement des marchés financiers, des fintechs, des payements électroniques, de l’épargne institutionnelle.
La digitalisation des procédures afin de renforcer la transparence sur le plan fiscal entre autres et le financement vert sont de nature à réduire la fraude et à renforcer la transparence.
L’approche marocaine basée sur l’innovation et la transformation des ressources est présenté comme un exemple.
Et le Maroc selon ce haut responsable du ministère de l’économie est engagé à partager son expérience et son savoir-faire dans ce domaine.
A noter que cette première journée a commencé par l’élection du Bureau, l’adoption de l’ordre du jour et du programme de travail.
Elle a été marquée par des sessions importantes : la première est intitulé : « Evolution des conditions économiques et sociales en Afrique du Nord : examen du profil sous régional » et « l’examen de la mise en œuvre des programmes et des initiatives spéciales de développement régionaux et internationaux en Afrique du Nord. »
Ainsi, en Afrique du Nord, la croissance économique demeure modeste. On note une hausse de 1% en 2024 par rapport à 2023, soit une croissance de 3,6%. Cela est le résultat des chocs endogènes, de la guerre en Ukraine et de la hausse des prix des produits de base.
En 2025 cette croissance régionale de 3,6% est soutenue par des productions en hausse dans les domaines de la production des hydrocarbures et des produits agricoles.
Cette croissance varie d’un pays à l’autre. En Algérie on note une croissance modérée de 3,4%. En Egypte, la croissance attendue en 2025 est de 0,3%. Elle s’appuie sur une augmentation des recettes touristiques et des investissements dans les hydrocarbures.
Au Maroc on table sur 4,5% en 2025.
En Tunisie, une reprise fragile de 2,5% est signalée.
Au Soudan, à cause d’une baisse drastique au niveau du secteur des BTP, le taux est de2,5% en 2025.
En Mauritanie, même si le déficit s’est élargi de 1,4%, le profil souligne « le maintien d’une performance solide » grâce aux progrès réalisés dans les secteurs agricole, minier et des hydrocarbures (exploitation gazière).
Les dépenses dans le secteur gazier sont compensées par les revenus dans les domaines des mines et des Télécoms.
Enfin en Libye on note l’essor le plus important avec un taux de 15,50%.
La MRN au centre des débats
La mobilisation des ressources nationales (MRN) basée sur l’innovation constitue cette année le sujet phare de ce conclave annuel du bureau de la CEA.
En effet, la mobilisation des ressources nationales (MRN) constitue un pilier de l’indépendance budgétaire et du financement du développement d’un pays.
Selon une note émanant du Bureau régional de la CEA basé à Rabat, l’Afrique du Nord expérimente déjà certaines innovations.
Ainsi, afin de réduire les pertes de recettes liées à l’économie informelle, l’administration fiscale égyptienne a numérisé le système fiscal à travers une plateforme de facturation et de reçus électroniques basée sur les technologies Microsoft. Cette réforme a permis d’améliorer la conformité en simplifiant les procédures et en offrant des canaux de soumission flexibles. Le pays a instauré la facturation et les reçus électroniques obligatoires pour les entreprises, avec le soutien de moteurs de risque basés sur l’IA au sein de l’administration fiscale égyptienne.
Les premiers résultats indiquent une réduction de la fraude fiscale et une amélioration de la conformité, la stratégie fiscale à moyen terme visant une augmentation de 3 % du PIB des recettes fiscales d’ici 2027.
Le Maroc a numérisé plus de 547 services administratifs, dont le dépôt électronique et le paiement des impôts via mobile. L’introduction de la facturation électronique et des plateformes numériques pour les PME a permis de réduire les coûts de mise en conformité, d’améliorer la transparence et de contribuer à l’intégration des acteurs informels.
L’Algérie a lancé le portail fiscal numérique Jibayatic, qui permet le dépôt à distance, les paiements en ligne ainsi que l’authentification des contribuables. Des outils complémentaires, tels que le portail Tabioucom pour les timbres fiscaux et les systèmes d’identification fiscale électronique, contribuent à réduire la corruption et à faciliter la prestation de services.
Toutefois, des lacunes persistent en matière de culture numérique et de cybersécurité.
La Mauritanie expérimente actuellement une plateforme nationale de paiement numérique ainsi que des systèmes de déclaration électronique pour les impôts et les douanes. Ces innovations ont contribué à faire progresser le ratio impôts/PIB de 12,2 % en 2020 à 14,1 % en 2022 (FMI, 2023), bien que des chocs externes aient entraîné une baisse temporaire.
La Tunisie a été l’un des pays pionniers dans la mise en place de systèmes fiscaux mobiles et développe actuellement des solutions d’achat numérique et de suivi des dépenses. Ces outils visent à renforcer la transparence fiscale, à réduire les fuites et à améliorer la confiance du public.
À noter qu’à l’échelle mondiale, l’OCDE et le FMI ont souligné le potentiel des solutions numériques permettant d’augmenter de 2 à 4 points de pourcentage le ratio impôts/PIB dans les pays en développement.
A noter que durant cette réunion, des panélistes triés sur le volet conduisent les débats auxquels ont prennent part des invités d’origines diverses dont des experts, et des spécialistes du monde des affaires et de la société civile.
Bakari Gueye/Rabat






