MADAR/Nouakchott le 18-04-2024
La capitale mauritanienne abrite depuis hier un atelier de concertation inter-acteurs sur l’élaboration de la directive d’Aménagement du cordon dunaire de Nouakchott.
Cet atelier de 2 jours sera consacré à la discussion autour de la Directive d’Aménagement du Littoral (DAL) et principalement à l’étude initiée par le projet WACA (Programme de gestion des zones côtières de l’Afrique de l’Ouest) sur la question pour le compte du ministère de l’Environnement.
C’est donc un atelier de lancement du rapport-diagnostic élargi à tous les acteurs.
Participent à cette rencontre des experts de la Banque Mondiale, de l’IMROP, des géographes, des océanographes, des cadres du ministère de l’Environnement, des étudiants, des architectes-urbanistes, des officiers de la marine nationale, des journalistes…
Ouvrant les travaux, le représentant du ministère de l’environnement a remercié la Banque Mondiale pour son appui, rappelant au passage l’historique de la DAL en Mauritanie où la DAL a été initié il y a près de 20 ans pour les villes de Nouakchott, Nouadhibou et Ndiago.
La première DAL étant celle de la Baie de l’Etoile mais qui n’a toujours pas été validée.
Des DAL que le ministère envisage de finaliser, a-t-il noté.
Lui succédant, Mohamed Lemine Ould Baba, le coordinateur national du projet WACA a affirmé que la DAL constitue un outil stratégique et vital pour le pays ; et d’ajouter que son adoption qui est prévue par le Plan Directeur d’Aménagement du Littoral Mauritanien (PDALM) est très attendue.
En effet, note le coordinateur, la DAL est un instrument qui permet la prévention des risques naturels (inondations, etc), la prévention des risques anthropiques et la délimitation géographique et spatiale.
A son tour Mr Nicolas coordinateur régional du projet WACA s’est réjouit au nom de la Banque Mondiale d’avoir accompagné le gouvernement mauritanien pour encadrer la résilience en zone côtière. C’est là dit-il la philosophie du projet WACA et la DAL est dit-il un élément clé du processus.
C’est un instrument fondamental qui permet d’avoir une vision partagée des défis principaux du littoral.
Aurélie Ledissez du cabinet d’étude ARTELIA a quant à elle rappelé le contexte de l’étude en question et la restitution faîte en décembre dernier. Il s’agit aujourd’hui dit-elle à travers cet atelier, de confronter le diagnostic avec de nouvelles propositions et de réfléchir ensemble sur les grands concepts de co-construction.
Principes de la GIZC
Dans sa présentation Aurélie a affirmé d’emblée que tout le travail de co-construction s’inscrit dans le cadre de la Gestion Intégrée des Zones Côtières (GIZC).
Cette intervention répondait à la question qu’est-ce-qu’on peut faire pour aménager le littoral. Elle a comporté plusieurs point dont un aperçu sur l’étude de vulnérabilité du cordon dunaire ; des notions de résiliences des zones côtières ; l’anticipation et la prospection avec une réponse à la question : qu’est-ce qu’on veut pour le littoral de demain ?
Un travail sur des scénarios contrastés afin d’amener à une prise de conscience des dangers et converger vers une solution idéale.
S’agissant du principe de la GIZC, on en parle depuis longtemps et notamment à partir des années 60 quant on a commencé à maîtriser le Génie Civil sur le littoral. Mais on s’est rendu compte, avec les transports sédimentaires qu’on ne maîtrisait pas certaines choses.
Ainsi, à la base de la GIZC il y a le développement durable. De ce fait, un projet littoral est un projet dynamique, qui doit être suivi, monitoré, adapté, etc.
A noter que pour cette étude, la première étape fut l’identification des aléas (submersion, érosion, etc). Dans la seconde étape il y a un rappel de la DAL qui couvre un périmètre de 60 Km du Nord au Sud. 18 Km de ce cordon sont encore bien portants, avec une côte assez haute et une homogénéité en termes de typologie d’usage. Malgré tout ce cordon est considéré comme étant sous-perfusion.
Dans la zone centrale, on note une vulnérabilité plus accrue avec 300 à 350 m en trait de côte et la proximité de la route bitumée. C’est dans cette zone que se trouvent les brèches, au Nord du marché de poisson, et au Sud vers le port et la base marine. Et il y a un dernier secteur où le cordon a complètement disparu.
A noter que cette étude est basée sur des relevés topographiques anciens, le seul relevé récent concerne la zone du marché de poisson. Donc un sérieux problème de cartographie de terrain. Cela se traduit par l’absence au niveau de l’étude de toutes les interventions récentes portant sur les nouvelles vulnérabilités, le renforcement du cordon et la végétarisation.
L’étude s’est basée sur un Modèle Numérique de Terrain (MNT) fondé sur des données datées de 2016.
Se pose aussi le problème du référentiel altimétrique, comme tel est le cas dans toutes les autres études.
La délimitation de la zone concernée par la DAL fait aussi polémique.
Ainsi, pour le Dr Mokhtar Hassan de l’université de Nouakchott on doit tenir compte de l’uniformité géographique. Pour lui Nouakchott est un Golfe ancien datant de 4000 ans. Son aéroport construit selon les critères météorologiques de Tombouctou, rappelle un expert se trouve dans la Sebkha N’Dramcha.
De ce fait selon le professeur il faut tenir compte de l’unité géomorphologique de Nouakchott qui est soumis à plusieurs dynamiques sédimentaires. En 1985, l’eau est parti du Chat Tboul, endroit le plus bas du delta, jusqu’aux limites de Nouakchott. En 1997 on a assisté à l’inondation du marché de Nouakchott. On doit aussi tenir compte du Bassin Sénégalo-mauritanien avec la brèche de Saint-Louis dite brèche Abdoulaye Wade car c’est elle qui ferait tomber les maisons de N’Diago, souligne le Pr Mokhtar qui ajoute que les travaux de l’entreprise Eiffage sur la côte de Saint-Louis a des impacts jusqu’en Mauritanie.
Et il y a enfin le canal de Nouakchott situé à 60 km. Donc conclut le Pr Mokhtar c’est cette unité naturelle qui doit être prise en compte dans l’élaboration de la DAL.
En réponse à ces remarques, les initiateurs de l’étude justifie l’initiative de la mise en place de la DAL de Nouakchott par une situation de semi-urgence.
A noter que les solutions préconisées par l’étude pour le littoral Nouakchottois ont été déclinées et discutées au cours de cette première journée.
(Nous y reviendrons)
Bakari Gueye