Les dessous de la visite du fils de Haftar dans les pays du Sahel

MADAR/Nouakchott le 03-09-2024

Saddam Khalifa Haftar, fils de l’homme fort de l’est de la Libye, Khalifa Haftar, visite les pays du Sahel depuis un certain temps, ce qui reflète l’intérêt croissant pour la région depuis que la Russie a dévoilé le « Corps africain » au début de l’année 2024 pour y étendre sa présence militaire.

Saddam Haftar est revenu sur le devant de la scène en mai dernier, lorsque son père l’a nommé chef d’état-major des forces terrestres. Environ un mois après cette promotion militaire, il a été envoyé en tant qu’envoyé spécial auprès du président tchadien Mohamed Idriss Deby Itno.

En juillet, Saddam est reçu à Ouagadougou par le président de transition du Burkina Faso, le capitaine Ibrahim Traoré, et fin août, il est reçu à Niamey par le président de transition du Niger, Abdourahmane Tiani.

Ces visites successives reflètent l’intérêt de la Russie pour la région, dans laquelle Moscou souhaite que la Libye, représentée par son allié oriental Khalifa Haftar, soit le lien entre elle et ses nouveaux alliés au Sahel.

La situation de la Libye à proximité des pays du Tchad, du Niger et du Soudan est d’un grand intérêt pour la Russie afin d’étendre sa présence militaire et de relier les pays qui sont militairement présents ou qui cherchent à l’être.

Cette dimension explique le choix par la Russie de l’est de la Libye pour accueillir le quartier général central du Corps africain, qui comprend à ce stade, outre la Libye, le Burkina Faso, le Niger, le Mali et la Centrafrique.

Ces derniers mois, la Russie a intensifié ses visites militaires dans l’est de la Libye, au Mali, au Niger et au Burkina Faso. Le ministre des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov, s’est rendu dans la capitale tchadienne, N’Djamena, précédé d’une visite qualifiée d’historique par le président tchadien à Moscou, où il s’est entretenu avec le président Vladimir Poutine.

Les États-Unis d’Amérique, qui se sont retirés militairement du Niger à la demande de ses nouvelles autorités, n’ont pas manqué l’intérêt croissant de la Russie pour l’est de la Libye à des fins stratégiques. Ainsi, le commandant de leurs forces en Afrique (AFRICOM), le général Michael Langley, s’est rendu il y a quelques jours à Benghazi, en compagnie du chargé d’affaires Jeremy Burnett, et s’est entretenu avec le maréchal Khalifa Haftar.

Le pari de la Russie sur l’est de la Libye, dont le gouvernement et l’armée ne sont pas reconnus internationalement, pour établir la présence militaire de Moscou sur la côte africaine et chercher à étendre cette activité à d’autres pays de la région, poussera les rivaux internationaux de la Russie à se concentrer sur la Libye dans la période à venir, soit par le biais d’une concurrence à l’est, soit par des pressions et des efforts visant à réduire le champ d’action.

Outre les dimensions externes de Saddam Haftar, le plus jeune fils du maréchal libyen, qui intensifie ses visites dans les pays du Sahel, d’autres dimensions internes ne peuvent être négligées, car l’octogénaire, qui a été victime d’un accident vasculaire cérébral en 2018, a accordé à ses fils des pouvoirs étendus, peut-être en préparation de leur succession au pouvoir, et en cherchant à gouverner le pays.

Dans ce contexte, Saddam – qui a déjà été promu au rang de général de division et n’a que 33 ans – a été nommé à la tête des forces terrestres qui contrôlent environ les deux tiers du territoire libyen.

Outre Saddam, le parlement de l’Est libyen, dirigé par Aguila Saleh, a nommé Belqasim Haftar directeur du Fonds de reconstruction de la Libye.

Quant à Khaled Haftar, il a été promu au rang de général de division à la tête des unités de sécurité de l’armée en juillet 2023.

Si la promotion par Haftar de trois de ses six fils à des postes de direction vise en fait à hériter du pouvoir dans le cadre d’un projet plus large visant à étendre le contrôle et la domination sur la Libye, il s’appuiera fortement sur ses alliés extérieurs et pourrait chercher à élargir le cercle à d’autres nouveaux alliés.

Ainsi, les mouvements civils parallèles aux mouvements militaires entrepris par Saddam Haftar, qui ont conduit certains des chefs de l’autorité dans l’est de la Libye vers certains pays arabes, peuvent s’inscrire dans le cadre de ces arrangements.

 

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