MADAR/Nouakchott le 25-10-2024
Selon un rapport du Conseil européen des relations étrangères (ECFR), les pays de l’UE sont divisés sur la manière de traiter les juntes de coup d’État dans la région du Sahel en Afrique, l’Italie allant à l’encontre de l’approche radicale représentée par la France, alors qu’elle souffre de l’afflux de migrants par la porte libyenne.
Selon le rapport, les Européens se sont retrouvés face à une junte militaire fortement soutenue par l’ours russe, où l’un des principaux dilemmes autour des tables rondes de Bruxelles et dans les capitales européennes a émergé dans la politique à adopter contre les dirigeants issus d’un coup d’État.
Selon le Conseil de la politique étrangère et de sécurité européenne, les pays de l’UE sont divisés en trois camps, un camp qui adopte l’option de la ligne dure face aux militaires sahéliens, dirigé par la France, un camp intermédiaire qui fournit une assistance matérielle aux conseils sans aucune coopération militaire, tandis que le troisième camp, représenté par l’Italie, considère que traiter avec les conseils militaires est une nécessité stratégique pour la sécurité du vieux continent.
L’option radicale :
Le Conseil européen a critiqué l’option radicale adoptée par Paris, qui laisse peu de possibilités de coopération diplomatique, économique, développementale ou militaire avec les trois conseils militaires du Sahel. Elle se concentre sur la canalisation des ressources et de la formation vers les pays amis du Golfe de Guinée. La Suède et le Danemark ont également adopté une approche plus dure, mais qui s’appuie davantage sur les principes des droits de l’homme.
Les deux pays réduisent l’aide au développement et ferment leurs ambassades à Bamako et à Ouagadougou. Ils transfèrent également des ressources du Sahel vers des pays plus proches de leurs préoccupations, tels que le Sénégal et le Ghana.
L’option centriste
Le deuxième camp décrit par le Conseil européen est mené par des pays qui tentent de trouver un juste milieu, en maintenant les ambassades, les pourparlers et les flux d’aide, mais en érigeant un pare-feu autour de la coopération en matière de sécurité avec les putschistes.
L’Allemagne, qui s’est efforcée de maintenir son engagement dans le Sahel, le cas échéant, appartient à ce camp, de même que la Belgique et les Pays-Bas. Bien qu’il ne soit pas membre de l’UE, le Royaume-Uni est un autre membre important.
L’option de l’engagement absolu
Le troisième camp préconise de traiter avec la junte militaire au Sahel pour s’aligner sur les intérêts stratégiques de l’Europe.
Le rapport cite l’exemple de l’Italie, qui considère qu’un engagement continu avec le Niger est nécessaire pour contrôler le flux de réfugiés et de migrants irréguliers passant par la Libye, et qui est le seul État membre de l’UE à avoir maintenu des forces spéciales au Niger pour aider à former les forces locales.
Madrid considère la coopération avec la junte militaire malienne, via la Mauritanie voisine, comme une priorité stratégique pour des raisons de migration et de sécurité.
L’Espagne a dirigé la mission de formation de l’UE au Mali jusqu’à ce que le Conseil de l’UE mette fin à l’opération en mai 2024.
Le Conseil européen critique l’option radicale
Le Conseil européen a critiqué l’approche radicale qui a fini par intensifier les sentiments de suspicion, de rejet et de ressentiment entre les forces armées et la population locale. Les Maliens, les Burkinabés et les Nigériens, qui souffrent déjà des effets du conflit, sont désormais confrontés à une insécurité croissante et à un sentiment d’abandon, tandis que la ligne dure européenne a laissé trois des pays les plus pauvres du monde encore plus isolés et vulnérables.
À Paris, on pense que les juntes entameront des négociations avec les Russes, se rendront compte que c’est un mauvais choix et reviendront ensuite dans les bras chaleureux de la France, comme un fils prodigue dans le désert, d’après le Conseil européen.
Recommandations
Même si la Russie est un partenaire douteux pour les dirigeants sahéliens, d’autres puissances moyennes font la queue pour passer des accords avec elle.
La Commission a recommandé de renouveler la coopération stratégique avec Bruxelles, l’objectif étant d’éviter l’effondrement complet des États situés sur le flanc sud de l’Europe et de faire contrepoids aux forces hostiles.