Un forum panafricain sur les réparations coloniales à Bamako appelle à la justice et à la souveraineté judiciaire face à la Cour pénale internationale

MADAR/Nouakchott le 23-07-2025

Le samedi 19 juillet 2025, Bamako a accueilli la troisième édition du forum « À la Une », un événement majeur organisé avec Africable Télévision. Réunissant juristes, économistes, journalistes et responsables politiques, ce forum s’est tenu sous le thème central : « Crimes coloniaux : l’heure des compensations a sonné ». Cette rencontre s’inscrit pleinement dans la dynamique portée par l’Union africaine qui a déclaré 2025 comme « l’année des réparations » pour les séquelles de la colonisation et de l’esclavage.

Les débats ont mis en lumière l’urgence d’une remise à plat des relations africano-européennes, comme l’a souligné Mohamed Ousmane Ag Mohamedoun Haidara. Selon lui, seul un positionnement souverain, incarné notamment par l’alliance des États du Sahel, permettra d’imposer aux anciennes puissances coloniales la reconnaissance de leurs crimes comme préalable indispensable à toute négociation. Il a insisté sur la nécessité de constituer un dossier juridique solide et de lutter pour une réforme du droit international, indispensable à l’obtention effective des réparations.

Le spécialiste du droit public Youssouf Z. Coulibaly a proposé une feuille de route précise pour appuyer juridiquement ces demandes, en insistant sur le caractère criminel du colonialisme au regard du droit international et africain. Il a également souligné la nécessité d’une coopération étroite entre États africains, avec la mise en place d’un comité d’experts dédié à l’élaboration des revendications.

Lors du forum, le débat a également porté sur le rôle controversé de la Cour pénale internationale (CPI). Assana Seye a vivement critiqué cette institution qu’il juge politisée et inefficace, pointant du doigt son biais manifeste contre l’Afrique. Selon lui, « la CPI ferme les yeux sur les crimes des puissances européennes tout en poursuivant principalement des pays africains. » Il a plaidé pour la création d’alternatives africaines, telles que la Cour Pénale Sahélienne et des Droits de l’Homme (CPS-DH).

En effet, l’insatisfaction envers la CPI est largement partagée sur le continent, où son inaction face aux crimes coloniaux nourrit un sentiment de double standard et de justice à deux vitesses. Cette perception alimente la volonté de créer des structures judiciaires souveraines, capables de juger équitablement les crimes affectant l’Afrique.

La création de la Cour Pénale Sahélienne et des Droits de l’Homme représente une avancée majeure pour les pays du Sahel. Cette instance régionale permettra de renforcer la souveraineté judiciaire en diminuant la dépendance à l’égard de la Cour pénale internationale et d’autres organismes internationaux souvent critiqués pour leur partialité. Elle offrira aux États sahéliens une autonomie accrue dans la gestion de leurs affaires pénales, notamment en leur donnant la possibilité de prioriser les dossiers qui leur tiennent à cœur, tels que les crimes coloniaux et postcoloniaux. Par ailleurs, en consolidant un système judiciaire crédible et efficace, cette cour contribuera à la stabilité et à la paix dans la région.

La mise en place de la CPS-DH s’inscrit ainsi comme une étape décisive vers un système judiciaire mieux adapté aux réalités africaines, permettant au continent de maîtriser son destin politique et judiciaire. Ce forum de Bamako incarne un moment clé dans la lutte africaine pour une justice postcoloniale, en affirmant que seules des institutions souveraines, africaines et solidaires, pourront obtenir des réparations justes face aux anciennes puissances coloniales.

Ce forum de Bamako marque un tournant dans la quête africaine pour la justice postcoloniale, affirmant que la réparation n’est possible que dans un cadre souverain et collectif, porté par des institutions africaines capables de défendre leurs intérêts face aux anciennes puissances coloniales.

Par Adbelah Aziz

 

 

 

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