Le rapport de la Cour des Comptes fait mouche

MADAR/Nouakchott/Le 22-10-2023

Le Rapport  tant attendu de la Cour des Comptes pour les années 2019-2020-2021 est enfin tombé entre les mains du président de la République. Ce rapport a révélé de graves dépassements au niveau de plusieurs départements ministériels et d’institutions étatiques.

Des cas flagrants de mauvaise gestion et de dilapidation des deniers publics ont été mis en évidence.

Des responsables impliqués au niveau  de certains départements ont été purement et simplement révoqués par décision du Conseil des ministres tenu le 18 octobre dernier.
plusieurs têtes dont des responsables jusque-là inamovibles sont tombées. Les limogeages ont concerné notamment pour le moment le Directeur de l’Institut Supérieur d’Études et de Recherches Islamiques (ISERI) et ancien secrétaire général du ministère du Travail social, Mohamed Mahmoud Ould Sidi Yahya, le Secrétaire général du ministère de la fonction publique et ancien secrétaire général du ministère de l’Environnement, Mohamed Ould Ahmedoua et le Secrétaire général du ministère du Commerce et ancien secrétaire général du ministère de l’Environnement, Abdoul Mamadou Barry.
L’ex commissaire à la sécurité alimentaire Mohamed Mahmoud Ould Bouasriya, ainsi que son prédécesseur, Najoua El Kettab, sont également dans le collimateur de la Cour des Comptes.

Le Commissariat à la Sécurité Alimentaire et la SOMELEC ont aussi été épinglés.

Notons que malgré la volonté politique affichée et les mises au point régulières du président de la République la mauvaise gestion des deniers publics demeure une tare bien ancrée dans les pratiques quotidiennes des responsables de l’État.

Au mois de mars 20222 à Nouakchott, le président de la République avait cloué au pilori le rendement quasi nul d’une administration de sous-développement, une administration évoluant dans un cocon et complètement en déphasage avec les attentes du citoyen ; et dans la même foulée il avait blâmé les Walis du pays pour leur comportement en porte-à-faux avec les missions qui leurs sont dévolues et qui ont pour objectif principal de servir le citoyen.

Or et c’est un secret de Polichinelle, ces Walis sont considérés comme de véritables potentats locaux et se comportent comme tels.

Ainsi donc, des ministres aux Walis en passant par tous les maillons de la chaîne, c’est toute la machine de l’État qui s’en trouve grippée ; une situation qui compromet dangereusement tous les efforts de développement et dont le citoyen paie le plus lourd tribut.

En effet ce dernier fait figure de dindon de la farce et n’a quasiment droit qu’à des tracasseries et à des humiliations.

Pas étonnant donc que les citoyens viennent camper régulièrement devant la Présidence pour se plaindre.

Ce dysfonctionnement et cette léthargie de l’administration favorisent une corruption qui gangrène tout le système et qui se passe à ciel ouvert.

En effet, la corruption est solidement ancrée dans les pratiques et dans le mode de gestion et ce malgré la mise en œuvre de programmes d’appui à la bonne gouvernance et d’institutions de régulation et de contrôle.

La Mauritanie est signataire de la Convention des Nations Unies contre la corruption, et en 2010 un projet de loi relatif à la lutte contre la corruption a été promulgué. C’est la fameuse loi n°2016.014 qui a été adoptée par le parlement.

Et dans son article 1, c’est une loi « visant à prévenir et combattre la corruption dans toutes ses formes » mais aussi faciliter et appuyer la coopération internationale dans le domaine de la lutte contre la corruption et le recouvrement des avoirs qui y sont relatifs ; promouvoir l’intégrité et la transparence dans la gestion des secteurs public et privé et l’effectivité du principe de la responsabilité et la gestion saine des biens publics.

Ces objectifs sont remplis à travers les huit chapitres qui constituent ce projet de loi.  Le Chapitre premier est relatif aux dispositions générales. Le chapitre deuxième est consacré aux mesures préventives de la corruption. Le chapitre troisième met en place  l’organe  national de prévention et de lutte  contre la corruption. Le chapitre quatrième contient les incriminations et les  sanctions en matière de corruption. Le Chapitre cinquième  détermine les procédures judiciaires applicables en matière de poursuites des infractions liées à la corruption. Le chapitre sixième  est dédié aux instances judiciaires compétentes et le chapitre septième à la  coopération internationale et le recouvrement d’avoirs liés à la corruption. Le chapitre huitième est réservé aux dispositions finales qui facilitent l’application de ce texte fondamental en matière de lutte contre la corruption.

Ce projet de loi introduit les dispositions de la Convention des Nations Unies contre la corruption dans l’arsenal juridique mauritanien.

Et dans son article 4, il est fait obligation de déclaration de patrimoine des personnalités suivantes :du Président de la République, des parlementaires, du président et des membres du Conseil constitutionnel, du Premier Ministre et des membres du Gouvernement et assimilés, du président de la Cour des comptes, du Gouverneur de la Banque Centrale de Mauritanie, des ambassadeurs et consuls et des walis.

« La personne concernée souscrit la déclaration de patrimoine dans le mois qui suit sa date d’installation ou celle de l’exercice de son mandat électif.

En cas de modification substantielle de son patrimoine, la personne concernée procède immédiatement, et dans les mêmes formes, au renouvellement de la déclaration initiale.

La déclaration de patrimoine est également établie tous les deux ans et en fin de mandat ou de cessation d’activité. »

La loi codifie l’information sur le conflit d’intérêt, la passation des marchés publics, la gestion des finances publiques, la transparence dans les relations avec le public, les mesures concernant le corps des magistrats, le secteur privé, les normes comptables, la participation de la société civile à la prévention et à la lutte contre la corruption est encouragée.

Il y a aussi les mesures visant à prévenir  le blanchiment d’argent…

La législation est donc bien là. Malheureusement entre la théorie et la réalité il y a encore un grand fossé et la nécessité d’opérationnaliser cet arsenal juridique s’impose aujourd’hui plus que jamais.

Il est grand temps que notre pays se mette sur le train du développement et de la bonne gouvernance. Toutes les conditions sont réunies et nous devons en profiter et se mettre enfin au travail.

La Mauritanie dispose  pourtant de beaucoup plus d’atouts que des pays comme le Rwanda, l’Ile Maurice, le Cap Vert, qui figurent aujourd’hui au peloton de tête des champions du développement et de la bonne gouvernance sur le continent.

La Rédaction

 

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